Conférence de presse de la défense

La journée a commencé avant l’audience de 14h00, ce 2 février, puisque la défense organisait une conférence de presse au siège de la Ligue des Droits de l’Homme à 11h30.

Les avocats reviennent pour la plupart sur l’ensemble des moyens qu’ils ont soulevé à l’audience du 27 janvier.

Le contexte de violences et de tensions au sein du CRA depuis de nombreux mois.

Les conseils rappellent l’atmosphère qui a régné les mois précédents l’incendie du CRA notamment en mentionnant le rapport de la Commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention administrative et des zones d’attente (CRAZA) puis poursuivent sur la superficie du centre. Le CRA de Vincennes était passé de 140 à 280 places, déshumanisant encore plus le lieu. Ce centre était un camp d’internement pour étrangers où automutilations, tentatives de suicides et violences étaient plus que régulières. Vincennes a brûlé mais cela peut recommencer puisqu’en France, les autorités continuent de construire des centres de rétention de plus de 140 places comme cela va être le cas au CRA du Mesnil Amelot en mars prochain malgré les oppositions de certaines instances comme le contrôleur général des lieux privatifs de liberté.

Le manque d’éléments de personnalité concernant les prévenus
à 11h30.
A aucun moment de l’instruction, il n’est fait mention de l’histoire des prévenus : qui sont-ils ? D’où viennent-ils ? quels sont leur exil ?...etc. Me Terrel souligne que son client a été détenu pendant 8 mois, entendu une seule fois pendant 15 minutes. L’instruction ne sait pas intéressée à ces personnes : « Il n’y a pas de faits, il n’y a pas d’actes, il n’y a personne » scande Me Terrel. La défense affirme qu’ici les détenus ne sont personnes, ils n’existent pas.

La détention provisoire des prévenus ne repose sur rien

Les différentes motivations du placement en détention provisoire :

Risque de réitération de l’infraction : Me Braun souligne « est-il réellement raisonnable de penser qu’un des prévenus allait brûler une autre fois un centre de rétention, alors même que ce n’était pas déjà le cas la première fois. »

Risque que les prévenus fassent pression sur les témoins : une fois de plus, Me Braun demande s’il est raisonnable de penser qu’un sans papier viennent harceler des policiers.

Eviter la concertation frauduleuse : Me Braun rappelle que si l’on voulait réellement éviter la concertation frauduleuse, il aurait mieux valu penser à ne pas placer en détention plusieurs des prévenus dans le même bâtiment de Fleury Mérogis puisque non seulement certains des prévenus étaient emprisonnés au même endroit mais en plus, la concertation frauduleuse, s’il devait y en avoir eu une, aurait été possible lors des déplacements des prévenus devant le juge d’instruction.

Pour Me Braun, la détention provisoire ne repose sur rien.

Le manque d’expertise technique sur les matériaux

Pourquoi le centre de rétention a-t-il brûlé si rapidement ? Me Boitel se demande si le bâtiment était aux normes puisque ce ne sont pas que les matelas et les draps qui ont brulé, c’est également la charpente des bâtiments.

La mise en examen des prévenus pour incendie volontaire, quelle base légale ?

Pour Me Terrel « on a pêché au hasard une dizaine de personnes parce qu’il fallait des coupables ». Elle rappelle qu’aucun des prévenus n’a été désigné par les policiers comme les auteurs des incendies.
Aujourd’hui « la défense demande donc le minimum légal » acène Me Terrel, « l’instruction a été inéquitable », « Le tribunal bafoue clairement les droits de la défense ». Me Bedossa revient sur le fait « qu’il n’y a pas d’urgence » à statuer rapidement sur cette affaire. La défense a le sentiment que la justice veut aller vite dans ce procès au mépris de ces droits et de ceux de ses clients. Me Bedossa demande que les médias relaient leur préoccupation car « si la défense est en danger, tout le monde est en danger s’il n’y a plus de garants des libertés ».

Une instruction à charge
L’ensemble des demandes d’actes de la défense comme le transport sur les lieux, une expertise indépendante, l’accès à l’ensemble des vidéos...etc. Tout a été refusé en bloque par le juge d’instruction. Me Braun souligne « je vous passe les réflexions sur le Bambara qui serait un dialecte, sur l’Islam... ». Me Terrel fait le parallèle avec l’instruction de l’affaire d’Outreau et les problèmes à l’instruction.
Les avocats de la défense continuent « le dossier est vide », voilà pourquoi des compléments d’informations ont été demandées pendant l’instruction, à l’ordonnance de fixation des dates du procès mais aussi devant la 16ème chambre correctionnelle.

Le Tribunal bafoue les droits de la défense

La défense avait demandé à récupérer des cédéroms des vidéos des CRA et non pas de le visionner en audience comme c’est le cas depuis lundi. Il n’est pas possible pour la défense de travailler ainsi et de défendre correctement les droits de leurs clients.

Les audiences depuis lundi matin se déroulent sans fondement légal d’après les avocats. Selon la défense, le tribunal viole l’article 461 du code de procédure pénale qui stipule qu’un jugement doit être prononcé pour la poursuite d’audience, ce qui n’a apparemment pas été le cas. Les avocats disent ne pas avoir trouvé ce jugement au dossier. Ils ont soulevé cet argument lundi 1er février devant le tribunal qui l’a balayé en joignant l’incident au fond considérant que les audiences sont régulières et que les débats peuvent continuer.

Le calendrier des nouvelles audiences n’a pas été fixé dans le respect du contradictoire. La défense a le sentiment que ce calendrier lui est imposé. Trois après midi d’audience par semaine pendant trois semaines, la défense estime qu’il n’est pas possible pour eux d’intervenir correctement pour la défense de leur client en pressant les avocats à se plier à ce calendrier très chargé. Cela crée un problème de gestion des autres dossiers des avocats mais surtout cela ne leur permet pas de pouvoir défendre correctement leur client, notamment si le visionnage des vidéos se fait dans l’enceinte de tribunal, 35h de visionnage.

Il n’y a pas de caractère urgent à juger cette affaire

Me Bedossa « n’a jamais vu ça ! ». Pour l’avocate, il n’y a pas de caractère urgent à juger cette affaire, « on a le sentiment comme si on ne voulait pas la publicité des débats » et que tout devait aller vite. Elle en appelle aux médias en leur indiquant que « si la défense est en danger c’est tout le monde qui est en danger ». Me Braun rappelle que le droit des étrangers est « un laboratoire d’expérimentation » qui a toujours vocation à s’élargir à l’ensemble des citoyens français. Il faut donc être prudent dans ce procès. Pour Me Terrel, la seule chose urgente ici « c’est un procès équitable ».

La défense dénonce un procès inéquitable

Les avocats de la défense n’ont d’autre choix que de sortir de la salle d’audience et d’être absent lors des débats afin de dénoncer ce qui est pour eux un procès inéquitable. En restant à l’extérieur de l’enceinte du tribunal, ils entendent mettre en lumière les conditions dans lesquelles est traitée la défense.

Le vice bâtonnier, Monsieur Le Borgne, sera présent à l’audience à 13h30 afin défendre les droits de la défense. Pour les avocats, les droits de la défense ne peuvent être respectés que si un renvoi est prononcé.

Ils précisent aux journalistes qui demandent ce qui se passera si la présidente refuse de renvoyer l’affaire qu’ils continueront à ne pas aller aux audiences. Le procès se tiendra donc sans défense et sans prévenus.