Communiqué de Presse suite à la visite du Centre de Rétention de Nouadhibou

L’Association Mauritanienne des Droits de l’Homme (AMDH) a pu se rendre pour la première fois dans le centre de rétention de Nouadhibou dans l’après-midi du 16/3/2011, afin de faire un état des lieux du centre, de s’entretenir avec les migrants et le personnel de l’établissement. L’accès avait été refusé pendant la campagne de Migreurop en 2009 et l’AMDH avait alors organisé une journée de sensibilisation à proximité du centre. L’AMDH a principalement remarqué des problèmes d’accès aux droits : il n’est pas possible pour les migrants de déposer une demande d’asile, ni d’effectuer un recours depuis le centre, ce qui rend impossible toute sortie du camp en vue d’un séjour en Mauritanie. De plus, l’association s’est vue refuser un entretien privé et confidentiel avec les détenus, le responsable de l’établissement ayant demandé aux agents de sécurité d’être toujours présents avec les visiteurs.

L’AMDH a en outre noté que les personnes refoulées sont systématiquement renvoyées à la frontière sans que les autorités des pays concernés (Mali, Sénégal) en soient informées. Selon des informations obtenues après la visite, le nombre de personnes maintenues dans le centre a chuté ces dernières années : 3 754 personnes détenues en 2008, 2 340 en 2009 et 363 en 2010. L’AMDH remarque que cette diminution témoigne de l’absence de flux migratoire massif et permet de remettre en cause l’existence même du centre d’enfermement pour migrants.


A notre arrivée, les éléments de la Police qui assurent la surveillance, avertis par leur supérieur hiérarchique de notre arrivée, nous ont ouvert la porte de la pièce où étaient enfermés 11 personnes ; une pièce à la dimension d’une salle de classe de cette école primaire transformée en centre d’enfermement en 2006.

A l’intérieur de la pièce le sol était mouillé d’eau et plusieurs saletés rendaient l’atmosphère bien lourde en raison de l’absence d’aération suffisante.

J’ai fait remarquer aux agents de la sécurité que l’entretien avec les retenus doit être confidentiel, mais ces derniers ont répondu qu’ils ont reçu l’ordre d’assister aux entretiens afin de pouvoir en rendre compte à leur chef.

Devant ce fait, j’ai opté néanmoins pour la poursuite de ma visite afin de recueillir le maximum d’informations pouvant aider à construire des éléments d’un dossier plutôt que d’y renoncer.

Suite aux différents entretiens effectués, il en est ressorti que les migrants, âgés de 35 à 20 ans sont tous originaires de la sous région : Sénégal, Guinée Conakry, Gambie à l’exception d’un Camerounais. Selon leurs témoignages, ils auraient été arrêtés au poste de police près de Nouadhibou, communément appelé « Bouchon », pour entrée illégale sur le territoire en possession de faux documents ou pour de passeport non revêtu de visa. Certains sont arrêtés depuis au moins 15 jours et détenus dans les locaux de la police avant d’être transférés au centre qui est l’ultime étape avant le refoulement.

Ils ont déclaré avoir été bien traité dans le centre par les policiers et avoir été correctement pris en charge par le Croissant Rouge en terme de nourriture et de couverture.

Avant même de finir les entretiens, le bus de la police, chargé de les acheminer à Nouakchott pour leur refoulement vers la Sénégal pénètre dans l’enceinte du centre et dans lequel ils embarquèrent. J’ai pu noter l’enthousiasme de certains à en fin quitter cet endroit comme l’expression d’une fin de calvaire, signe que l’enfermement était vécu avec beaucoup de peines et d’angoisses.

Les Sénégalais, bien que n’ayant pas de pièces d’identité sont des pêcheurs de longue date à Nouadhibou et venaient par la mer à bord de leurs embarcations. Cette fois ci en raison du vent, ils ont décidé de prendre la route. Le capitaine de leur pirogue serait venu à la police le confirmer.

Dans ces conditions, les autorités auraient pu les laisser continuer leur travail sous la garantie de leur patron en attendant qu’ils régularisent leur situation, surtout qu’il n y a pas de visa entre les deux pays comme pour la Gambie aussi.

Ce refoulement est signe d’un durcissement des politiques de gestion des flux migratoires par la Mauritanie ces dernières années.